samedi 17 janvier 2009

Comment Emily Dickinson devint poète...



"...le ciel au dessus d'Amherst devient noir comme à la mort du Christ. Un orage éclate alors qu'une calèche traverse un bois de pins. Les éclairs fusillent les arbres, les diables du déluge mitraillent le toit de la calèche, contrainte de s'arrêter. A l'intérieur se trouve la petite Emily, deux ans et demi, que sa mère, sur le point d'accoucher de Vinnie, vient d'envoyer pour un mois chez la tante Lavinia.
L'enfant fixe l'apocalypse, supplie sa tante: "Ramène moi chez ma mère, ramène-moi chez ma mère."
Les soldats agonisants appellent ainsi et personne ne leur répond.
Personne ne répond non plus à la petite guerrière de deux ans et demi égarée sur le champs de bataille du monde.
Soudain, rencognée sur la banquette de cuir, surnaturellement , elle se tait.

"Si vous n'avalez pas votre mort et votre peur d'un seul coup, vous ne ferez jamais rien de bon." dit Thérèse d'Avila.

C'est ce que vient de faire l'abandonnée : la terreur des tonnes d'eau, l'irréparable silence de la mère, elle vient d'avaler ça d'un coup.
les diables s'en vont ailleurs donner du poing, le ciel brille admirablement, le voyage peut reprendre. "
Extrait de "La dame blanche" de Christian Bobin
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